Le Feu - Henri Barbusse
Henri Barbusse est surtout connu pour Le Feu, son roman - témoignage sur la Grande Guerre, un des premiers documents - authentiques - sur le sujet, écrit en 1915, dans la même veine qu'A l'ouest, rien de nouveau d'Erich Maria Remarque. Ces deux écrivains ont en commun d'avoir vécu la guerre dans leur chair, dans des camps différents !
Barbusse publia son premier ouvrage, un recueil de vers, Pleureuses, en 1895, qui lui valut des bonnes critiques. En 1903, il publie son second recueil, Les Suppliants. Sa réputation grandit avec en 1908, son premier roman, L'Enfer.
Le Feu provoqua suite à sa sortie une querelle littéraire en France et par delà les frontières entre les tenants et les opposants au "mensonge guerrier". C'est donc au fond un roman antimilitariste - contre la guerre mais pas contre les soldats !
Le Feu reçoit le Prix Goncourt en 1916 pour son réalisme notamment. Barbusse devient par la suite un grand admirateur de la Révolution de 1917 et écrivit sur le sujet ! Il est décédé à Moscou en 1935.
Le Feu est sous-titré "Journal d'une escouade" et on suit une pléthore de personnages : le narrateur, Fouillade, Volpatte, Cocon, Lamuse, Barque, Farfadet, Marthereau, Paradis, Blaise, Biquet, Pépin, Eudore, Mesnil-André, Poterloo, Tirette, Bertrand... Le groupe est uni par une fraternité de soldats bien qu'il soit hétéroclite et composé d'hommes de tous horizons (mais principalement ouvriers et laboureurs...).
Stylistiquement, le roman inaugure de nouvelles voies littéraires : introduction du langage familier et de l'argot dans l'écriture (chemin suivi notamment par deux autres écrivains ayant vécu le conflit : Céline et Aragon...).
La Grande Guerre est décrite au plus près, à hauteur d'hommes et non de cartes d'états-majors. Ces thèmes ont été maintes fois repris depuis : l'attente dans les tranchées, les conditions de vie des Poilus (les poux, les rats, l'humidité, la boue), le "divorce" avec l'arrière (les profiteurs et les planqués), la débrouillardise et le système D, l'intendance de cette "machinerie" qui broie les hommes, la "bonne blessure"...
Bref, la guerre est une tragédie absurde et le soldat devient tantôt une stupide victime tantôt un ignoble bourreau. Le Poilu trouve réconfort dans le vin (le "pinard"), les lettres, le barda, le tabac...
Au niveau du lexique employé dans le récit, pour dire l'indicible, on note la surabondance de thèmes morbides : "cimetière", "morts", "ombres", "fantômes", "nécropole", "crypte", "spectres". Le registre de l'hallucination et du cauchemar est aussi présent de même que les quatre éléments : Feu, Eau, Terre, Ciel...
Le titre, enfin ! Le Feu évoque aussi bien les combats - et la survie- que la popotte - et la subsistance !
Le dernier chapitre est un plaidoyer de la "Der des Der" !
Bref, un roman prenant, édifiant et très fort !
A bientôt !